Canal + diffuse semaine après semaine les 7 épisodes de la première série réalisée par Thomas Vinterberg. Imaginée par le réalisateur de Festen, La Chasse et Drunk, à Paris bien avant la crise du Coronavirus mais un peu après la série norvégienne Occupied, Families like ours est une fresque colorée et tragique qui propose un univers visuel unique.
Dès les premières minutes de la série, la nouvelle est annoncée sous forme de texto reproduit à l’écran : le gouvernement danois va fermer ses frontières après que la Hollande a fait faillite à force de vouloir maintenir ses polders. Et Vinterberg prend le temps de nous présenter sa famille fragmentée à travers une jeune fille qui termine son lycée et dont les parents sont séparés. L’oncle de la jeune femme est par ailleurs l’un des premiers à connaître la nouvelle, et pour protéger les siens il n’hésite pas à commettre un délit d’initié…
En travaillant avec ardeur le portrait très fin de cette famille de petite bourgeoisie, Thomas Vinterberg refuse volontiers les éléments les plus attendus pour une série : du rythme dans l’écriture, un effet de dépendance et la capacité de créer une addiction. Proposant des plans magnifiques sur la capitale et les faubourgs d’un pays que l’eau ne déborde pas encore mais auquel tous ses habitants doivent dire adieu, il prend tout son temps pour fignoler des portraits de personnages complexes. On traverse l’annonce de la tragédie sur le vélo de l’héroïne qui perd une pédale et on se prend à observer chaque coutume, chaque référence culturelle et chaque intérieur parfaitement design comme un petit morceau d’un monde condamné à disparaître. L’administration est cette cage d’acier, neutre, froide et idiote. Et surtout jamais incarnée. Et certains parents éloignés reviennent juste pour marquer comment la solidarité se recompose face à l’inimaginable.
Ainsi, à mille lieues du brûlot écologiste, Thomas Vinterberg s’appuie sur une situation extrême et politiquement bien vue (ce sont les Danois qui supplient les autres pays d’Europe, dont la France et la Roumanie, de leur trouver des lieux où vivre) pour interroger les recoins les plus sombres de l’âme humaine. Mais également la lumière de la jeunesse et de l’amour adolescent et la ténacité d’une amitié à travers les années. Alors même qu’il est conscient et qu’il affirme que le Danemark n’est pas éligible à prendre ainsi l’eau, selon les scientifiques d’aujourd’hui, Vinterberg décide de pousser le fameux « effet de réel » jusqu’à ses confins et de nous livrer une fable terrifiante de réalisme parce que follement humaine. Résultat ? Sans aucun rebond grandiose, on attend son nouvel épisode chaque semaine et on profite au passage des déclarations d’amour en images à Paris et à Copenhague.
Families like Ours, de Thomas Vinterberg, avec : Amaryllis April August, Albert Rudbeck Lindhardt, Nikolaj Lie Kaas, Danemark, Suède, Royaume-Uni, Norvège, Belgique, France, 7X52 minutes.
Visuel © affiche / Canal +