Cannes : « Promis le ciel » de Erige Sehiri : une ouverture féminine et émouvante pour Un Certain Regard

par Yaël Hirsch
14.05.2025

C’est le troisième film de la réalisatrice tunisienne Erige Sehiri, Promis le Ciel, qui ouvre la compétition Un Certain Regard au 78e Festival de Cannes. Un film fort sur la diaspora subsaharienne à Tunis, porté par trois actrices extraordinaires et une photo bluffante.

Des femmes et des Dieux

Trois femmes s’activent autour d’une baignoire : elles nettoient et peignent les cheveux d’une toute petite fille à qui elles posent mille questions. La petite fille, c’est Kenza, qui ne sait ni son âge, ni d’où elle vient, et qui a survécu au naufrage d’un bateau où presque tous les passagers ont péri. La maison, c’est celle que loue à Tunis, Marie, une femme pasteure ivoirienne qui a réuni autour d’elle une fervente communauté de croyant.e.s subsaharienne.s dont la plupart n’ont pas de papiers et ne sont pas bienvenu.e.s en Tunisie. Avec elle et très solidaires habitent Naney, une pro du système D, qui a laissé sa fille derrière elle en espérant gagner assez bien sa vie pour la faire venir, et Jolie, qui a un visa étudiant et se destine à de brillantes études. Ensemble, elles adoptent la petite alors que la situation de leur communauté est de plus en plus précaire et dangereuse en Tunisie.

La vie avant tout

Magnifiquement filmé et porté par trois actrices magnifiques qui incarnent trois personnes merveilleusement dessinées, Promis de ciel est un film qui marque et qui transporte. C’est une tranche de vie mordante dans un quotidien terriblement précaire et néanmoins jamais misérable. Un quotidien qui pourrait paraître triplement étranger au spectateur cannois : on est dans une communauté de fervent.e.s évangéliques, d’origine ivoirienne en Tunisie. Mais avec une écriture de personnages et une photo saisissantes, Erige Sehir nous lie au plus intime de nous-mêmes, à ces femmes qui se débattent souvent dans le noir, mais qui tentent de rester fidèles à elles-mêmes et aux copines dans un climat de tension et de désespoir extrêmes. Avec et malgré toute son ironie, le facteur religieux devient presque accessible et touchant, alors que même dans la plus grande précarité, les femmes de ce film savent inspirer, chacune à sa manière, l’admiration et le respect.

Promis le Ciel de, Erige Sehiri, avec Aïssa Maïga, Debora Lobe Naney, Laetitia Ky, Estelle Kenza Dogbo, Foued Zaazaa. En compétition en section Un Certain regard.
Visuel ©ManekiFilms_Henia-Production / Jour2Fête

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