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«Clubbing», L’immersion explosive au Grand Palais

par Antoine Couder
05.06.2025

La nouvelle exposition du Grand Palais immersif plonge ses visiteurs dans l’histoire mondiale des clubs et revisite ainsi un pan de notre histoire politique et culturelle.

Il y a d’abord une sorte de grand récit. L’histoire du clubbing ressemble parfois à un road movie. Le célèbre Loft ou le Paradise garage à New York, la Warehouse de Chicago, le Berghain de Berlin ou le Pacha d’Ibiza. Autant d’images et de sons qui cristallisent une jeunesse à un instant « t » et son agencement plus profond avec les marges de son époque, pour des moments de pure jubilation, parfois de réarticulation avec des communautés obscures ou peu visibilisées. Ce qui a commencé avec la disco et sa version paillette du struggle for life urbain s’est peu à peu transformé en house-music, avec les années 1990 et la progression des niveaux de vie, de l’élargissement de la démocratie et surtout – at last but not least- avec l’apport des musiques noires et latino longtemps interdites d’expression explicite. La night, plus exactement la fête, longtemps resté rituelle ou rite de passage vers l’âge adulte est devenu un élément plus général de la vie sociale, pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur, l’inventivité culturelle, la liesse des corps qui se croisent et s’emmêlent à l’abri du contrôle social. Le pire : la gentrification progressive de quartiers de grandes villes et des stratégies de promotions immobilières concomitantes à la « renaissance » de certains quartiers lié au succès de lieux de clubbing, techno notamment. Touffue, insaisissable, parfois trompeuse, l’histoire du clubbing n’est pas évidente à saisir.  Et au sortir de ce parcours d’exposition volontariste, on sent qu’elle sort à peine de sa condition d’objet de consommation pour affronter sa muséographie.

 

Récits singuliers/ histoires particulières 

 

Celle-ci est d’abord une affaire d’histoire orale, DJ et passeurs de disques, chroniqueurs musicaux et témoins privilégiés d’une époque. Ce relais de paroles, d’explicitation est nécessaire et l’exposition du Grand Palais immersif ne se trompe pas sur sa nécessité, confiant à Patrick Vidal de quoi structurer un contenu historique ; playlists, scènes, personnages marquants… Et autres.  En écoutant son récit, on pense bien sûr à tous les autres, également présents ou plus fantomatiques tel les emblématiques Laurent Garnier, Cassius ou Mirwais. Avec ces séries de témoignages, on mesure à la fois la force du récit singulier des « grands hommes » (car il s’agit surtout d’hommes) et en même temps sa part d’invisibilité ; l’analyse globale du clubbing à renfort de statistiques complètes et cohérentes, de répertoire général des contenus (image, musique, vidéo) est encore à faire, pour prendre véritablement la mesure du fait social, au-delà des légendes et des récits post-rationnalisants (hier l’influence de la musique noire versus la musique mainstream ; aujourd’hui l’approche dé-coloniale versus la réalité des hybridations et des mélanges d’influence dans la production des sons, des ambiances et de la sociologie du clubbing).

 

Where is the data ? 

 

Pas question ici de jeter la suspicion sur ses témoignages riches d’inspirations et d’angles nouveaux, qui participent à l’élargissement de scripts culturels parfois convenus. Mais pour dépasser la mythologie, il faudrait un  travail de conceptualisation encore différent – en mettant, par exemple, face à face la grande story d’un John Travolta dans « Saturday night fever », en 1977, et la production d’un Lee Scratch Perry ces mêmes années- pour comprendre en quoi les scénarios d’évolution du rapport à la danse sociale (pour nommer plus grossièrement le clubbing) sont composés d’éléments disparates qui concourent à produire des faits sociaux liés qui  parfois s’opposent, ou simplement se détachent les uns les autres pour des raisons communautaires ou purement marketing. À ce titre, on peut se souvenir qu’à cette même époque « fondatrice », tous les influenceurs/ professionnels de la night et du divertissement pariaient sur une hégémonie mondiale du reggae, alors que ce sera finalement le hip-hop qui – contre toute attente- imposera son leadership. Ainsi, comprendre précisément ce que chacun écoutait, à quel moment et à quel endroit se révèle un enjeu d’études crucial à venir.

 

Capitalisme numérique

 

Le caractère historique de l’objet « clubbing » explique ainsi son caractère ambigu d’aujourd’hui, à mi-chemin entre sociologie et commerce ; production d’un champ cohérent de consommation via les DSP (plate-forme de diffusion) et marketing de la nostalgie et de la segmentation des genres. Le clubbing est toujours tiraillé entre la légende d’une histoire faite de rebellion, de jaillissement de créativité et la réalité d’une production de plus en plus artificielle de briques de styles éternellement recomposables dans un son d’ambiance général n’appartenant à personne et finalement à tout le monde, que l’on peut découper, mélanger à volonté sur la base de catégories subjectives (Chat GPT, sors de ce corps !). Une question : qui sait aujourd’hui faire la différence entre de la musique originale et de la musique artificiellement produite ? Pas grand monde, parce qu’en réalité le sujet est bien difficile à trancher. Mais on sort peut-être à ce stade du champ spécifique du clubbing qui ne fait qu’anticiper des questions plus générale : l’artificialisation des rapports sociaux que sculpte le capitalisme numérique et l’existence spécifique d’un droit « moral » décorrélé et non réductible au droit d’auteur anglo-saxon,  simple « actif » d’une entreprise-propriétaire (la plupart du temps un éditeur, lui-même lié à des maisons de disques, elle-même actionnaires significatifs des DSP, avec les vétérans de la première révolution Internet).

 

L’invention de nouvelles formes immersives

 

Si le clubbing n’a pas encore atteint le stade d’une « catégorie de pensée », il peut en revanche en exprimer une authentique incarnation, dans l’espace même de sa mise en œuvre (la « boite », la « house », le « basement ») et c’est peut-être ici la révélation de cette exposition qui met en mouvement le face-à-face entre le visiteur-clubbeur et le principe même qui l’induit aujourd’hui, cette artificialisation générale des champs d’expérience et des rapports sociaux. Ainsi l’entrée dans l’exposition passe par la création d’un avatar que l’on pourra voir projeter sur les images-algorithmes qui tapissent les murs et l’esprit même de l’exposition. Fabriquées à partir de mouvements chorégraphiques répertoriés, de styles vestimentaires catégorisés, ces images mettent littéralement en scène ce qui se trame aujourd’hui dans l’industrie du divertissement  : une réalité artificielle qui nous échappe et en même temps reproduit un lien vibratoire qui nous unit ; le moment collectif de la danse, l’effet dopamine combiné à la réalité singulière d’un temps social et d’une réalité socioculturelle (quel club, quel style, quelle année, quelles sensations ?).

 

Communautés d’avatars

 

On retrouve cet effet de balancement entre spontanéité/authenticité et artificialité/fake, récemment exploré par Julie Ackermann dans son livre « Hyperpop », dans la scénographie de Pierre Giner, le commissaire d’une exposition créée par l’équipe de ce « nouveau » Grand Palais ( Chargeurs Museum Studio, pilotés par Delphine de Canecaude). On y observe ce qui pourrait ressembler à une véritable possibilité d’immersion, c’est-à-dire une expérience un peu plus politique qui se distingue de ce l’on connaît déjà et qui -la plupart du temps- ne l’est vraiment pas, politique. Ainsi les approches récréatives, type « Atelier des Lumières » ou spectaculaire dans le genre parc d’attractions  (« Parc Astérix », « Le Puy du Fou »), ainsi que les propositions plus sévèrement didactiques comme celles que proposent généralement les grandes institutions publique, s’imaginant que le peuple vit toujours dans la préparation de son bac de français et s’angoisse de se découvrir inculte. Idem pour ces productions sans doute plus imaginatives, mais soumises aux lois du marché de la petite industrie radiophonique qui se concentrent sur le fait d’ajouter des temps d’écoute sur des temps contraints comme le fait le secteur du podcast (écoute en mobilité, écoute en faisant le ménage ou le repassage). Avec ce «clubbing », sorte de versant activiste de l’exposition « Disco » de la Philharmonie de Paris, il semble qu’une « forme » véritable apparaissent plus franchement, celle d’une muséographie qui met en mouvement son public sur son objet exposé pour littéralement en incarner son propos, non seulement son histoire, ses acteurs mais aussi sa fabrication, sa réalité autant que son artificialité. On espère que cette exposition fera des émules, notamment lors du prochain ARTKLUB, le 5 juillet au Centre Pompidou, où plus de 2 300 clubbeurs sont attendus dans un forum d métamorphosé en dancefloor géant (sous la direction artistique de John Lorenc et Yohann Aircadi).

 

« Clubbing », plongée culturelle immersive dans l’histoire mondiale des clubs, sous la direction de Pierre Giner. Grand Palais immersif, 110, rue de Lyon 75012, jusqu’au 1er octobre.

Photo : Quentin_Chevrier

visuel (c) DR