Un week-end ensoleillé et chargé sur la Croisette, entre rattrapage de films, déception, et grand bol d’air en salles obscures !
Après une journée de rattrapage pour le reste de l’équipe notamment sur Sirat, un film qui divise un peu la rédaction, c’était l’occasion de voir Dalloway (de Yann Gozlan) samedi en fin d’après-midi. Et il est difficile d’imaginer un tel ratage sur un sujet pourtant d’une brûlante actualité. Tout y est : poncifs sur l’Intelligence Artificielle (« Ciel, elle va prendre notre place ! »), pathos porté par la mort du fils et une musique démonstrative, une Cécile de France en mode panique en permanence face à une Anna Mouglalis qui joue de sa voix en méchante manipulatrice. Si l’on rajoute à cela les catastrophes (canicule, virus) pour faire ambiance dans un propos limite complotiste sur la vilaine société qui veut posséder notre âme, on se dit que malgré la présence sonore de Mylène Farmer, on est franchement… désenchanté.e ! Il y a plus de 50 ans, Kubrick nous inventait HAL une IA avant l’heure qui n’en faisait déjà qu’à sa tête. Voir qu’en 2025, on ne sait nous proposer que Dalloway laisse un peu pantois.
Tout commence dans un camp de water-polo américain où des ados pré-pubères en montée de testosterone s’inventent des fantasmes masculinistes et masturbatoires. Parmi eux figure Eli (troublant Kenny Rasmussen) qui est, selon les autres, porteur de « la peste », et tout le monde fuit devant lui pour ne pas être contaminé. Cette peste va faire une nouvelle victime lorsque Ben (formidable Everett Blunck) va montrer de la compassion pour ce jeune, singulier à bien des égards, enfermé, malgré lui dans son petit monde.
Répétitif – sachant que c’est bien cela qui produit les irréversibles dommages -, le film dissèque de manière froide, avec un son et une musique aussi agressive que le comportement des jeunes, le mécanisme du harcèlement même lorsqu’un adulte tente de faire ce qu’il peut. Un film puissant qu’il serait salutaire de projeter dans les écoles.
C’est un temps que les moins de 20 ans… C’était pourtant la grande période des Cahiers du cinéma, de ses rédacteurices et de leurs premiers films. Tout le monde est dans Nouvelle vague de Richard Linklater : outre Truffaut, Chabrol, Schiffmann et Godard bien sûr, on croise Rohmer, Rouch, Rossellini, Melville, Gréco, Cocteau, Rivette. Le film pourrait avoir un petit côté la Nouvelle vague pour les nuls, mais avec Guillaume Marbeck, Zoey Deutch, Aubry Dullin, géniaux en Godard, Seberg et Belmondo, on adore être plongé•e dans ce livre d’images réjouissant, en noir et blanc, aux plans plus vrais que nature, à disséquer le tournage du légendaire À bout de souffle. Un prix de la mise en scène ? Ça le mérite…
Ce samedi midi, nous avons eu la chance d’être invité•es au déjeuner d’inauguration du CinéMo, à l’hôtel Pullman. La Fondation Art Explora, au cœur du projet, a dévoilé son camion-cinéma. Aux couleurs jaune beurre et violet vif, il a pour objectif d’ouvrir la culture à tous les horizons, en mettant l’accent sur le cinéma. À l’intérieur du camion, une moderne salle de projection accueille pas moins de 70 personnes, de tout âge, de toute classe sociale et dans toute la France.
Ces dernières années, le taux de présence dans les salles de cinéma a baissé de 10 points. La raison principale étant la distance physique. En conséquence, et avec l’essor des plateformes, le cinéma est en train de passer à domicile, et perd par la même de son essence. L’expérience en salle fait, elle, incomparablement honneur au septième art. Plongé•e dans le noir, il n’y a pas de quoi être déconcentré•e par une notification Instagram ou le livreur Deliveroo…
Aussi, CinéMo sillonne la France pour aller chercher celles et ceux qui ne vont plus jusqu’en salles. L’itinérance débute, pour d’évidentes raisons, à Cannes. Cerise sur le gâteau : les films de la programmation officielle pourront être visionnés dans le camion dès le lendemain de leur projection sur la Croisette !
Pour finir le week-end en beauté, quoi de mieux qu’un film d’horreur ? Sean Byrne tombe à pic à la Quinzaine des Cinéastes qui projette son nouveau long-métrage Dangerous animals. Un tueur en série, qui a une obsession pour les requins, kidnappe des jeunes femmes pour les donner à manger à ces « dangerous animals ». Dérangé comme il est, le tueur filme le tout pour profiter de ce spectacle gore à l’infini.
Ce synopsis alléchant, le réalisateur le met en scène d’une manière totalement inattendue. Des dialogues très clichés, de l’humour, des scènes bien gores… et le public a adoré. Des applaudissements et des rires animaient la séance du début à la fin, avec quelques soupirs unanimes pour les scènes parfois gênantes (faites exprès, on l’espère). Dans le tourbillon de films intellectuels du Festival de Cannes, cette projection un peu plus fun se présente comme une bouffée d’air frais !
On se dit, parfois, qu’avec un peu de méthode, un film aurait pu atteindre la perfection. Le roi soleil de Vincent Maël Cardona est de ceux-là. Il avait tous les ingrédients (dont une brochette d’acteurs au top : Sofiane Zermani, Pio Marmaï, Panayotis Pascot, Michaël Bejaoui Evans, Xianzeng Pan, Lucie Zhang, Joseph Olivennes et Maria de Medeiros) pour être une comédie noire hilarante pouvant se hisser à la hauteur d’un Tarantino, d’un Blier ou du Bernie de Dupontel. Raté !
L’histoire de ce huis clos dans un bar PMU de Versailles, où chacun cherche à échafauder des scénarios pour récupérer le ticket gagnant du loto d’un vieil homme décédé au petit matin, est une belle idée. Mais, le traitement façon puzzle et le rythme irrégulier (sans compter une conclusion lourdingue) nous font nous demander pourquoi on ne rit pas aux éclats pendant les quelques deux heures de délire de cette bande de pieds-nickelés. Faudrait peut-être remonter tout ça avant sa sortie en salles…
Enfin, Isabelle Huppert et Laurent Lafitte clôturaient la soirée dans La femme la plus riche du monde au Grand théâtre Lumière, mais on y revient demain…