A la barre se concentre sur les violences sexistes et sexuelles de manière documentaire. C.R.A.S.H. revisite de manière parodique mais néanmoins documentée l’affaire de Tarnac.
Il est plus qu’intéressant de constater à quel point le théâtre se saisit actuellement de la question judiciaire. Un hommage était rendu à Gisèle Pelicot par le Festival d’Avignon ce vendredi 18 juillet 2025 (lire notre chronique de la pièce de Milo Rau). Le même jour, nous avons vu A la barre de Ronan Chéneau dans la mise en scène de Steeve Brunet. En 1h15, la pièce ausculte le traitement par la justice des cas de violences sexistes et sexuelles. A partir d’affaires réelles, d’entretiens et d’enquêtes, les acteurs et actrices de la Compagnie du P’tit ballon endossent les rôles d’accusés, d’avocats, de juges, de greffiers ou encore de victimes. Plutôt que de se concentrer sur un ou deux cas très concrets, le spectacle multiplie les exemples de violences faites aux femmes. Et montre à quel point la justice peut se retrouvée dépassée face à un phénomène de société structurel. Si la pièce se révèle un peu trop longue et souffre de la comparaison avec Leviathan de Lorraine de Sagazan (lire notre article), A la barre reste une pièce forte dont le versant pédagogique reste réalisé avec finesse. D’autant plus que le spectacle se joue dans un lieu empreint d’émotions, le Tribunal d’Avignon.
Accueillis au Théâtre des Carmes André Benedetto par des jus de fruit et une musique au synthé jouée par un acteur déguisé en gendarme, nous nous asseyons dans l’un des théâtres les plus confortables d’Avignon (c’est important de le dire !). Et nous voilà embarqués dans une affaire complexe, celle de Tarnac, considérée comme l’un des grands « fiascos judiciaires » de l’ère Sarkozy. En 2008, Julien Coupat et neuf autres personnes sont accusés d’avoir saboté des caténaires. Après des mois d’enquêtes et d’accusation de terrorisme, la chambre correctionnelle relaxe tous les prévenus… Sans revenir précisément sur le déroulé de l’affaire, le spectacle s’intéresse aux douze jours d’audience du procès avec l’aide de cinq comédiens de la compagnie Hors jeu endossant les rôles d’avocats, de juge, d’accusés, de gendarmes, etc. Tout cela est fait avec une énergie débordante et un enthousiasme communicatif : plusieurs fois, le public réagit de lui-même face à l’injustice de la justice. Imitation de Nicolas Sarkozy, combats à la Kill Bill, chorégraphie sur « Alors on danse » de Stromae : tout cela, joyeusement foutraque, dit en réalité beaucoup sur le fonctionnement de la justice et de la police.
A la barre, Texte de Ronan Chéneau, Mise en scène de Steeve Brunet, Cendre dramatique national de Normandie-Rouen, A La Manufacture, Du 8 au 18 juillet à 11h et 15h pour une durée de 1h15
C.R.A.S.H., Ecriture et mise en scène de Sophie Lewisch, Compagnie Hors jeu, Au Théâtre des Carmes André Benedetto, Du 5 au 26 juillet à 19h50 pour une durée de 1h20
Visuel : © Photo de C.R.A.S.H. par Joseph Banderet