Le nouveau film de Jonathan Taïeb, Alterlove, offre 1h30 d’odyssée parisienne aux côtés d’un jeune duo d’acteur.ices qui viennent tout juste de se rencontrer. Complètement captivé.es, il nous arrive même de nous retenir de pousser la chansonnette ou d’applaudir avec les protagonistes à l’écran…
Le temps d’une nuit étirable à l’infini, deux inconnus dont on ne connaîtra jamais les noms, interprétés par Kim Higelin et Victor Poirier, se rencontrent au détour d’un bar, dans lequel la jeune femme vient d’essuyer un rendez-vous romantique raté. Surgissant de nulle part, le jeune homme lui propose de poursuivre cette soirée ensemble. Dès lors, les rues parisiennes s’offrent à eux, regorgeant d’endroits dans lesquelles se perdre pour se retrouver ensemble. Si cette ribambelle de découvertes s’apparente quelque peu à un parcours de visite de Paris pour les nul.les. Et le duo captive la caméra dans une valse nocturne envoûtante.
C’est une véritable errance que nous propose la caméra qui épouse parfaitement les mouvements déambulatoires dont Kim Higelin est le centre. Entre les phrases bateaux de la première rencontre, en passant par les réflexions philosophiques et les anecdotes échangées, nous les suivons qui traversent Paris, accompagné.es d’une lumière qui se rend actrice majeure de cette projection.
En effet, le jeu des lumières immerge le public dans une ville chaleureuse, troisième personne de cette relation d’un soir : le jaune tiède et chaleureux du bar et des rues nous installe confortablement dans nos sièges avant que les couleurs synthétiques et festives esthétisent les personnages et les espaces au sein desquels ils évoluent. Lors d’un trajet en taxi, les jeux d’ombres et de lumière sur les visages accentuent cette poésie du voyage nocturne que vivent les deux jeunes gens. Même le noir complet d’un dîner à l’aveugle réussit à nous immerger totalement.
Par ces décors parisiens, le réalisateur dresse le portrait d’une ville que l’on aime voir à la caméra, rangeant ainsi Alterlove dans un panthéon de films où le portrait de Paris se dresse en filigrane. Lors de la projection, des bribes de Midnight in Paris (Woody Allen), Les Amants du Pont-Neuf (Leos Carax) ou encore l’incontournable Before Sunrise (Linklater) viennent forcément traverser nos esprits.
La ville semble être celle de tous les possibles, offrant ainsi des lieux d’accueil pour cette soirée inédite tout en provoquant les rencontres, intégrant ainsi des parenthèses titubantes qui nous attrapent dans un karaoké ou une leçon de vie donnée par un chauffeur de taxi portraitisé en vieux sage.
Malheureusement, la spontanéité rafraîchissante sur laquelle débute le film et rythme les premiers moments se fatigue : les dialogues aux recoins extravagants se cassent sur des phrases pré-conçues tandis que la succession de lieux fascinants trouve sa fin dans une énième activité, la Fury Room insérant un passage qui dénote complètement avec le reste du film. Dans cette incise, la lumière est blafarde, montrant comme à nu les personnages qui dévoilent des émotions intenses, mais difficilement accessibles, la colère et la tristesse prennent place de manière incongrue, peut-être comme manière de montrer les déchirures à venir d’une relation amoureuse.
Tirant en longueur, le film s’essouffle, voulant prolonger pour prolonger une histoire dont certains passages usent la dimension de flottement si douce qui nous transportait au départ.
La fin rattrape les balbutiements et nous laisse tout de même avec le goût d’une nuit enchantée et partagée avec les personnages, à déambuler dans Paris.
Rendez-vous le 23 avril en salle pour rencontrer, le temps d’une heure trente, Paris et ses inconnu.es !